Aujourd’hui sur le blog, j’ai décidé de laisser la parole à deux mamans, pour deux regards croisés à propos du déni de grossesse. C’est un sujet dont on parle peu, et pourtant il touche chaque année de nombreuses familles. Comme en témoignent aujourd’hui Stéphanie et Hélène, on trouve autant de dénis que d’expériences différentes, tout comme chaque accouchement est différent.
Peux-tu nous expliquer ce qu’est le déni de grossesse ?
Stéphanie : Alors le terme déni de grossesse est très péjoratif et j’ai du mal à l’assumer. Pour moi ma choupette est un cadeau de la vie, un kinder méga surprise, une aventure. Le déni a une connotation tellement négative et notre aventure à 8 est tellement positive que ça ne colle pas ..
Hélène: Pour moi c’est un bébé qui se cache, parce que sa maman n’est pas prête à voir qu’il est là. Mais je n’aime pas cette expression, je la trouve dure, elle ne reflète pas la vie qu’on a aujourd’hui.
A quel moment as-tu découvert que tu étais enceinte ?
S : J’ai pris conscience (enfin si on peut dire ça) de ma grossesse quand bébétise a glissée sa tête dans mon bassin. Quand mon cerveau a compris que le mal de ventre n’était autre que des contractions et que j’étais en plein accouchement. J’ai donc découvert ma grossesse tout juste 10 minutes avant de tenir la puce dans nos bras !
H : Je m’en suis rendue compte lors d’un examen de routine chez l’obstétricien, j’avais des règles douloureuses. Il m’a fait une échographie avec la sonde et nous avons découvert que j’étais enceinte. Ce fut un choc ! Ensuite j’ai fait des examens plus approfondis, j’étais enceinte de 7 mois et demi, et j’ai accouché à 8 mois et demi !
Quelle a été ta réaction ?
S : La toute première chose a été de demander à l’équipe médicale qui est venue sur place d’aller prévenir mes nains que tout allait bien et de prévenir le papa que je le voulais auprès de moi, contre l’avis des médecins ! Je ne savais pas comment nous allions gérer l’urgence. Nous n avions rien pour accueillir décemment cette poupée. Et surtout, oui surtout est-ce qu’elle est en pleine santé et… entière.
H : Ce fut un choc, j’étais seule avec l’obstétricien, évidemment on n’amène pas son mec pour un contrôle de routine avec un gygy ! J’étais abasourdie, je n’y croyais pas ! L’obstétricien était surpris mais il est resté très pro et m’a rassurée et accompagnée pour le reste de ma grossesse.
Quelle a été la réaction du papa ?
S : Nous sommes passé par tellement de sentiments que je ne saurais dire quelle a été la première. De la peur, de la frustration, de la colère. Et ensuite l’inquiétude, le stress …
H : Il m’en a voulue. Aujourd’hui il s’en veut de m’en avoir voulue mais c’était plus fort que lui il pensait que je lui avais fait un bébé dans le dos !
Comment votre entourage a-t-il pris la nouvelle ?
S : D’abord chacun était inquiet de savoir si tout le monde allait bien ! Et ensuite cela a été une bonne nouvelle, comme à chaque naissance.
H : Pas très bien pour mes parents. Ils ne s’entendent pas avec le papa et nous n’étions pas en couple depuis longtemps, tout cela n’avait pas de sens pour eux. Et les parents de chéri l’ont bien pris, contre toutes attentes, ils étaient ravis pour nous ! Mes amis se sont divisés en deux clans, les ravis et les outrés. J’ai donc reconnu de suite mes vrais amis: ceux chez qui j’avais du soutien.
Quelle influence cette naissance a-t-elle eu sur votre quotidien ?
S : Aucune ! Juste avant la naissance de bébétise nous avions décidé de déménager et de passer d’un appartement en ville à une grande maison isolée à la campagne. Bébétise a simplement fait partie de l aventure…
H : Mon patron n’a pas compris. Il n’a pas très bien pris la nouvelle, il s’est senti trahit alors que je n’y étais pour rien, je ne le savais pas moi même ! Finalement il s’est excusé quelques temps plus tard et m’a soutenue dans ma décision de prendre un congé parental. Je n’avais pas eu mes mois de grossesse je voulais pouvoir profiter de mon enfant !
Comment expliques-tu ce qui t’est arrivé ?
S : Facile je ne l’explique toujours pas …. Comment après 5 grossesses qui se sont bien passées, je suis passée à coté de celle-ci? Comment est-ce que j’ai pu ne rien voir ? Enfin je pense que bébétise voulait faire partie de nos vies, que cette chipie s’est cachée pour être des nôtres. J’avais toujours dit après notre 5ème enfant que je n’en n’aurais plus, que je n’en voulais plus. Ben voila elle m’a faite mentir (rires).
H : Je pense que mon corps savait que ce n’était pas le moment pour nous d’avoir un enfant, donc j’ai refoulé tout ça, je ne voulais pas le voir.
Avec le recul, y-a-t’il des signes à côté desquels tu es peut-être passée ?
S : Même avec le recul, je n’ai aucun signe qui auraient pu me mettre la puce à l’oreille ! Pas de prise de poids, des règles hyper régulières, pas de douleurs. Enfin rien quoi !
H : Oui, quand je dis que mon corps savait, il m’a envoyée des signes. Je ne pouvais plus boutonner mes pantalons. J’avais mis ça sur le compte des fêtes de Noël qui m’avaient fait prendre quelques kilos ! Mais je pensais plutôt à un dérèglement hormonal car j’avais aussi les seins tendus et des règles douloureuses. C’est mon premier enfant, je n’aurais pas pu reconnaître tous ces signes que les mamans connaissent bien !
Les mamans qui vivent cet événement parlent souvent de culpabilité, en as-tu ressentie ?
S : Evidemment … comment on peut passer à côté d une grossesse ? Et si la pépette n’ avait pas été en forme ? Si la puce avait eu un souci de santé ? Enfin autant de questions qui resteront sans réponses… Autant de questions potentielles que Marion nous posera un jour et auxquelles nous ne pourrons pas répondre …
H : Oui et non. Au début oui énormément, puis finalement je me suis pardonnée. Ça arrive à d’autres mamans, même aux plus aguerries et on n’y peut rien.
As-tu des regrets et/ou des remords par rapport à cette situation ?
S : Les rares regrets que j’ai c’est le manque de ces 9 mois, ce lien si particulier que j’ai entretenu avec les 5 premiers. Ces 9 petits mois de préparation, de toucher, de câlinous intra-uterins … Et puis tout ce temps de préparation à l’arrivée de bébé.
Aucun remords, ma puce est arrivée comme une fleur, un vrai cadeau de la vie. Comment je pourrais avoir des remords sur sa naissance ? Ah si peut-être un seul remord, ne pas avoir su que bébétise se cachait lors du mariage de mon frère 2 mois auparavant. J’avais bien arrosé le mariage du frangin !
H : Oui je suis déçue de ne pas avoir profité de cette grossesse bien sûr et d’avoir continué de fumer et de boire lors des soirées entre amis. Je me dis toujours que mon fils aurait pu avoir des séquelles de ces mois sans savoir. Heureusement il va très bien, et nous espérons avoir d’autres enfants bientôt !
As-tu un message d’amour à faire passer à ton enfant ?
S : Tous les jours, on lui dit qu’on l aime, qu’elle est un vrai cadeau, que nous ne regrettons pas qu’elle se soit cachée, qu’elle illumine notre vie malgré les difficultés quotidiennes… Enfin bref, qu’elle est aussi particulière a nos yeux que sa naissance !
H : J’espère lui faire passer chaque jour le même message : je t’aime, tu nétais pas planifié mais les moments imprévus sont les meilleures surprises !
Un message à faire passer aux familles qui vivent cet événement ?
S : J’ose seulement espérer que ce qui nous est arrivé et qui arrivera à d’autres sera aussi perçu comme des cadeaux de la vie, que ces bébés qui se sont accrochés ne soient pas rejetés comme beaucoup dans les hôpitaux et que ces mamans frustrées trouvent autant de soutien que moi j’ai pu en avoir.
H : Essayez de ne pas culpabiliser et vivez l’instant avec votre enfant, vous n’avez pas ou peu eu de grossesse alors rattrapez le temps perdu. Tant pis pour les autres, essayez de mettre le « quand dira-t-on » de côté et vivez tout simplement.
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Merci à vous les filles pour ces témoignages sincères et émouvants. Je suis ravie de vous avoir laissé la parole sur le blog. Ce sont deux témoignages plein d’amour pour vos bébés surprises. Vous pouvez être fières de vous et de vos familles. <3
Si tu veux lire un peu plus au sujet du déni de grossesse, je te recommande « La décision » D’Isabelle Pandazopoulos.
Il existe aussi une association pour la reconnaissance du déni de grossesse, si tu veux en savoir plus ou recevoir du soutien: www.afrdg.info

Illustration soumise par Hélène, source aujourdhui.com